vendredi 13 novembre 2009

Le jour où je me suis fait sortir d'une salle de cinéma par la police


L'autre titre possible aurait été "Away you go".

Je ne sais pas si le fait qu'aujourd'hui, treizième jour du mois, soit tombé un vendredi a eu une incidence sur les évènements de ma journée, mais je me souviendrai de mon vendredi 13 novembre 2009.

Pour bien comprendre l'histoire, remontons au jour de la sortie du dernier film de Sam Mendes, "Away we go". Mercredi 4 novembre, séance de 12h10, parfait pendant la pause dej, je fonce dans une salle UGC très connue, sur les Champs-Elysées, voir le dernier né d'un de mes réalisateurs préférés (j'avais adoré "Revolution road" - "Les Noces rebelles" en français).

Les pubs, puis 12h30 le film démarre. Soudain, en plein film, après 35 minutes, les lumières se rallument, l'écran remonte automatiquement de quelques centimètres, et tout le monde se regarde, sans bouger. Arrive alors une employée du cinéma qui nous dit qu'une panne électrique vient de se produire sur tout le secteur, et nous demande d'attendre avant de savoir ce qu'on va faire.

Je te le donne émile, elle revient vingt minutes plus tard pour nous inviter à quitter la salle, la séance ayant pris trop de retard, et à demander notre invitation offerte en bas, à l'accueil. Grrrrr...

Vendredi 13 novembre, aujourd'hui donc.

Je calcule que si je me pointe à 13h à l'UGC "biiiiip" dans la même salle, j'arriverai juste avant le moment où ça a coupé la dernière fois, et même si je sais que les cinémas ne sont plus permanents, je ne conçois pas que le responsable n'ait ni le bon sens, ni le sens commercial nécessaires au succès de mon entreprise.

Sauf que je suis tombé sur le plus grand "biiiip" législateur et rigoriste qui n'a d'essence que celle qui doit remplir le réservoir de sa Fuego gris métal jantes alu. Parce que ce ne sont pas les sens humains qui font de ce J-M (ce prénom serait-il maudit ?) un ambassadeur du bon goût à l'endroit de sa clientèle...

- Bonjour Monsieur, j'étais de la première séance d'Away we go, avec la panne d'électricité, et je me disais que, à cas exceptionnel permission exceptionnelle, vous pourriez me laisser voir le reste du film que je n'ai pu voir, qui devrait arriver dans cinq minutes. Je sais que ce n'est pas permanent, mais il y a 7 spectateurs dans la salle, je me ferai discret, je vais m'asseoir très vite, et tout ira bien. (Là, franchement, j'étais presque sûr qu'il dirait oui. Peut-être parce que moi, à sa place, j'aurais dit oui. Erreur fatale. Je n'étais pas du tout à sa place...)

- Ah non, je suis désolé, ce n'est pas possible, il vous faut un ticket.

- Et bien donnez m'en un, j'ai ma carte UGC que je paie tous les mois depuis 10 ans, aucun problème !

- Ah non, le film est commencé, prochain ticket, 14h45.

- Mais Monsieur, à 14h45, je bosse moi. Je vous demande juste un peu de bon sens, de réfléchir avec ça (je montre le coeur) plutôt qu'avec ça (je montre la tête).

- Non, Monsieur, je ne peux pas, c'est interdit par le règlement.

- Mais ... (je me calme...) Monsieur... Les règles, je les respecte, mais parfois, vous ne pensez pas qu'on peut accepter certaines exceptions qui ne remettent pas en question le règlement ?

- Monsieur, ce n'est pas possible, c'est 14h45.

- Ecoutez, j'ai bossé ici quand j'étais étudiant, à l'UGC Champs-Elysées et au Biarritz aussi, en face, le grand patron de l'époque, Mr L. , n'aurait jamais refusé cette demande à un de ses clients !

- Oui, mais tout change Monsieur.

Putain, le truc qu'il ne fallait pas dire...

La goutte d'eau.

Le cheveu dans la soupe.

La mouche dans le lait !!!

Là, je sens que mes nerfs frissonnent à l'idée que je les laisse s'exprimer un peu... Et puis, comme en ce moment, ce n'est pas vraiment le moment de me chercher, je n'ai pas pu m'empêcher...

Je m'adresse à lui :

- Ok, vous pouvez me donner votre nom s'il vous plaît ?

- Mon nom ? Pour quoi faire ? Non !

- Non ?

- Non !

- Ok, vous faites ce que vous voulez, moi aussi. Je vais voir mon film.

Et là, je trace devant lui, je monte les escaliers quatre à quatre (le grand escalier à côté de l'entrée du Lido) en l'entendant derrière moi crier " Monsieur !! Vous allez où ?? Monsieur !!!

- Je vais voir mon film pour lequel j'avais payé et dont je n'ai pas vu la fin !!!!

Sauf que depuis le 4 novembre, ils avaient changé le film de salle. J'entre dans la salle, et là, je vois Miou-Miou, plein cadre, c'était "Le Concert". Damned ! Je suis fait ! Je redescends, je croise ce bon J-M (comme quoi on n'a pas besoin d'être blanc et d'avoir un oeil de verre pour tutoyer le fascisme) qui m'invite à me calmer et à sortir. Sauf que là, c'est trop tard mon pote...

- Monsieur, vous ne pouvez pas entrer, sortez, et calmez-vous...

- Mais bien sûr que je peux entrer !! Il suffirait que vous m'y autorisiez, mais non, la loi, le réglement, y'a que ça qui vous excite !! Vous avez le choix entre le bon sens et la connerie profonde, et vous choisissez la connerie !

- Monsieur, vous m'insultez ? (Vous savez, avec ce petit ton de mec à qui t'as juste envie de mettre ses mains dans un grille-pain)

- Non, j'vous insulte pas, je vous parle du choix que vous avez !! (oui, dans ces cas-là, on est toujours très fort dans l'insolence et la mauvaise foi) Allez, je vais rendre ma carte, allez vous faire foutre !

- Ah là, vous m'insultez !

- Bien J-M ! (je vous retranscris exactement mes propos, rien n'est exagéré ni réécrit pour faire joli)

Là, je redescends, je sors du cinéma, et à droite, je vois que la petite salle annexe est celle d'Away we go !! Vindidiou !!! Ni une, ni deux, je descends, je passe devant la caissière, d'un pas plus que déterminé, elle me lance :

- Monsieur ??? Monsieur !!!!

- Si J-M me cherche, vous lui direz que je suis là !!

- Mais qui êtes-vous ???

- Franck !


Surréaliste !

J'entre dans la salle, j'ai dû rater 5 minutes, je m'asseois au milieu de la salle, et je redescends doucement au niveau de la calmitude... N'arrivant pas vraiment à me concentrer complètement sur le film, je suis quand même assez content de me sentir autant "vivant". Carpe Diem... Oh Captain my captain bordel !!!

Pardon, je suis un peu grossier, mais c'est J- M, c'est pas moi...

Et puis, vingt minutes plus tard, deux policiers entrent dans la salle, uniforme, casquette et lampe torche ! Mais quel "biiiiiiiiiip"... !!! Il a appelé les flics !!! Il a appelé les flics ce pauvre "biiiiiiiip" !!!

C'est pas de l'ego ça ?? Il n'aurait pas pu me laisser voir le film finalement ? Non, pensez-vous... Le grand J-M, fort de son pouvoir de petit chef, qu'il confond avec un titre ministériel, ce doit être le sommet de sa carrière, a appelé des renforts pour virer le malfrat que je suis, la sale petite racaille dangereuse qui trouble l'ordre public, pour expulser un client de la salle d'une enseigne cinéma dont il a la carte !!

Les flics s'avancent vers moi avec la lampe :

- Bonjour Monsieur, c'est la Police (ah bon, c'est pas une surprise pour mon anniversaire alors ? En même temps, je me disais aussi, je suis né le 10 février...), veuillez nous suivre s'il vous plaît.

- Bien sûr. (Avec un petit sourire qui exprime autant mon hallucination que mon plaisir de sentir que je gère bien le truc au niveau émotionnel)

On se retrouve dans le couloir.

Moi :

- C'est pas vrai... Il a appelé la Police ???

Je raconte mon histoire, les deux policiers sont aussi bornés sur la loi, maman Loi, que leur pote au cerveau bouilli par trop d'administratif, je reconnais être passé un peu en force, mais sûr de mon bon droit, enfin plutôt de mon bon sens, je m'explique, et raconte en quoi tout ça relève d'une exagération complètement dingue ! J'essaie de la jouer, on se parle entre adultes responsables, de leur faire prendre un peu de recul intellectuel sur l'évènement, mais je crois qu'ils étaient déjà adossés au mur de leur incompétence sur le sujet.

- Je suis coupable donc...

- Non Monsieur, si vous étiez coupable, vous auriez déjà les menottes.

(La Police. Ou l'art du premier degré. Le seul qu'ils connaissent en même temps)

- Messieurs, j'ai fait mon service militaire dans la gendarmerie, et il m'est arrivé d'avoir à prendre un peu de distance par rapport à la loi quand les faits le commandaient.

- Non Monsieur, il y a un réglement, il faut le respecter.

- Ok, d'accord. Laissez tomber.

Je suis sorti de la salle. En me retournant une dernière fois vers J-M, qui parlait aux flics en me tournant le dos, et en lui lançant :

- Bravo pour votre intelligence, votre sens commercial, et votre bon sens ! Remarquable !

Devant le cinéma, j'attends que les flics sortent. Je filme leur sortie avec mon portable. Ils me contournent, j'arrête de filmer.

- Vous faites quoi là ?

- C'est pour mon blog ! On ne va jamais croire cette histoire quand je vais la raconter !

- Oui, mais vous n'avez pas le droit sans autorisation d'utiliser notre image, donc si je tombe sur votre blog, je porte plainte contre vous.

- Wouaouh... ah quand même... J'adore ce siècle... Bonne journée Messieurs !

- Bonne journée Monsieur.

Y'a des vendredi 13 plus calmes non ?

En tout cas, je crois qu'"Away we go", je vais attendre qu'il passe sur Canal.

Parce que si j'y retourne une 3ème fois, soit un kamikaze afghan cinéphile aura choisi cet endroit pour exposer ces organes sur le beau velours bleu UGC, soit je regarde le film entre deux retraitées qui toussent leurs millions de microbes en mode H1N1.


Franck Pelé

5 commentaires:

  1. tu pourrais aussi te faire poursuivre pour diffamation, tu devrais enlever le nom du cinema.

    RépondreSupprimer
  2. Tu veux dire le nom de la salle ? Je peux laisser UGC quand même... sinon, aucun interêt l'article qui veut dénoncer... non ? Mais c'est vrai que j'ai pensé à l'éventuelle diffamation. Ceci dit, la victime dans cette histoire, je ne suis pas sûr que ce soit UGC...

    RépondreSupprimer
  3. et voilà un cas typique du mec qui a un peu de pouvoir ... navrant ! mais récurrent ...

    RépondreSupprimer
  4. Ben y a des fois, où l'éloignement au fin fond de la province, vous semble plus sage et raisonnable, pour votre santé mentale ...
    Merci de ce témoignage, quant au nom du ciné, je pense que la situation doit être la même quelque soit le proprio de ces grands complexes sans âme.
    Voilà une chose, que j'apprécie dans mon bled, c'est le petit cinéma, au prix de la place abordable avec la clope fumée avant la séance en tapant la discussion "cinéma" avec le projectionniste.
    Certes, il y a des inconvénients but nobody's perfect.
    Pôdane.

    RépondreSupprimer
  5. Est-ce que le grand Dryke au courage aussi clair que son identité, voudrait bien m'envoyer un mail pour que je sache qui il est, et pour que je puisse lui répondre, avant de publier, éventuellement son commentaire..? J-M ? Ou un de ses collègues ? Ou monsieur de la Police ? Ou juste un jaloux qui erre, avec pour seul but celui d'être le dernier nombril, le seul ayant le droit d'exister, et de tout savoir mieux que tout le monde... Ceci dit, nous sommes en démocratie, et ton jugement vient enfin grossir les rangs de ceux qui sont d'accord avec le règlement. On s'inquiétait, pour l'instant, tous les lecteurs de cet article, je maintiens, n'en déplaise à Maître Drykello, étaient outrés par cet épisode, et par le comportement de ce pauvre JM...

    RépondreSupprimer