« -tu pars quand à cannes ? »
Ceux qui n’y allaient pas avaient besoin à toute force de savoir quand ceux qui y allaient iraient. Il en était ainsi avec le festival de Cannes. Et le phénomène inverse se produisait quand on en revenait. Tous ceux qui n’y étaient pas allés et qui, pour la plupart, n’iraient jamais, demandaient :
« -c’était comment Cannes ? »
Parce que Cannes était pour l’homme de média une des étapes qui marque une harassante année publique. Après Cannes il y avait Roland Garros où d’une certaine manière on remettait une raquette d’or, puis Wimbledon, puis le défilé du 14 juillet, puis la garden party, puis le bal des pompiers, puis le tour de France. Très vite la ligue 1 de football reprenait pour qu’on n’ait pas le sentiment de s’ennuyer, au mois d’août, en vacances. Avec la rentrée, venait Deauville, les prix littéraires, suivi des défilés de mode et d’une nouvelle édition du tournoi des 6 nations. A peine avait on fêté Halloween en critiquant la marchandisation des fêtes qu’on achetait des chrysanthèmes et qu’on choisissait son calendrier de l’avent. Venaient lesdites fêtes de fin d’année, qu’on se demandait déjà si on prendrait une galette frangipanée et si l’on commencerait cette année sa collection de fève. Cet hiver n’en finissait pas comme tous les hivers, on était assommé par du foot, il n’y avait pas assez de neige pour la coupe du monde de ski alpin, trop de vent pour les tours du monde à la voile et en solitaire… Le printemps revenait doucement, poisson d’avril, muguet, prix de F1 de Monaco sur le rocher où l’on ne peut jamais doubler, la fête des mamans, le baccalauréat…
Le spectacle ne se démentait jamais, surtout à la télévision qui avait transformé le monde en une forêt de marronniers, comme on appelle en journalisme les sujets bouche-trous. Il y avait aussi les soldes, les années électorales, de coupe du monde, bissextile, olympiques, les années météorologiquement incorrectes où paques était au tison, où les canicules euthanasiaient nos vieux, les étés pourris, les fléaux naturels grippes aviaires ou chikungugna, le ramadan qui tombait jamais pareil, comme le nouvel Harry Potter, et les ponts des jours fériés. Au cœur de cet éphéméride, Cannes restait un lieu mystérieux de culture absconse posé sur les plages des vacances.
Carnaval de Cannes/Extrait n°1 de "Perdu avenue Montaigne Vierge Marie" de Denis Parent (Stéphane Million éditeur)
à lire sur la page facebook de Denis Parent, écrivain, ancien journaliste de Studio Magazine, ici :
http://www.facebook.com/home.php?#/note.php?note_id=196324920715&ref=nf
Ne passez pas à côté de ce doux billet à l'endroit de Stéphane Guillon, croustillant...
http://www.facebook.com/home.php?#/note.php?note_id=136624835715
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